Incipit.

— On dirait la fin d’un monde, non ?
Élodie s’interrompit, jeta un regard à l’entour pour évaluer la remarque de Théo. Bordées de ballots de foin et de déchets de bois, à peine éclairées par un trait de lune, les excavatrices ressemblaient à présent à des oiseaux préhistoriques veillant sur leur nichée, prêts à fondre sur la campagne
environnante. 

Le livre.

« En redescendant en ville, ils se dévoilèrent un peu, se découvrirent un âge commun – vingt-six ans – et une rage partagée pour le siècle, l’argent-roi, les indignations faciles sur les réseaux sociaux. Elle l’emmena à l’arrière d’un bistrot. Ce soir du 6 janvier 2014, les registres de police administrative indiquent que deux “cibles”, deux suspects se sont retrouvés dans l’arrière-salle du Cafe Caminando, quartier de la Candelaria. »

Théo et Angela, deux âmes révoltées, ont compris qu’il ne suffit pas de tweeter pour changer le monde. Il faut cogner. Fascinés par la dernière des guérillas historiques, ils gagnent la forêt tropicale de Colombie et se font admettre dans le maquis des FARC. Mais la violence est toujours une déception.

Et dans la jungle, Dieu dansait est le troisième roman d’Alain Lallemand. Il y poursuit la description d’un monde contaminé par les conflits, où l’humanité devient un mode de résistance. Grand reporter au « Soir » de Bruxelles, ses reportages en Colombie lui ont valu le prix européen Lorenzo Natali.

Entre les lignes.

Et si la vague du djihad, des foreign fighters partis en Syrie,  annonçait un phénomène beaucoup plus inquiétant, un mouvement de génération qui  transcende les frontières communautaires et religieuses : la montée d’une révolte laïque, violente et armée, nourrie des injustices d’un monde ultralibéral ? Alors que les insurrections religieuses prennent le pas sur les guérillas marxistes et romantiques, le livre s’est construit en observant la renaissance des radicaux d’extrême-gauche menant en Europe des opérations violentes et de petits attentats contre les prisons, cependant que d’autres jeunes s’engageaient dans les bataillons d’Ukraine.

Pour l’auteur, ce roman prolonge une réflexion entamée dans le roman précédent: Ma plus belle déclaration de guerre (Luce Wilquin, 2014) exposait la nécessité de mener de manière équilibrée des combats lointains au bénéfice de l’espèce humaine et des combats proches au bénéfice de ses enfants, chacun de ces combats rejaillissant sur l’autre. Et dans la jungle, Dieu dansait expose un autre dilemme : dans quelle mesure la révolution, perçue comme la quête du bonheur pour tous, doit-elle l’emporter sur la quête du bonheur à deux ?  Et si le couple est privilégié – L’adieu aux armes -, à quel moment faut-il oser reprendre les armes ?

Distinctions.

Finaliste du Prix Cercle Chapel 2016.
Sélection du Prix des lycéens de Littérature 2016-2017.
Finaliste du Prix des bibliothèques de la Ville de Bruxelles 2017.

Accueil.

Coup de cœur de Jacqueline Pétroz, « Livres en poche » ( France Inter) :

La critique de Jean-Claude Vantroyen, dans Le Soir  de Bruxelles: « D’abord, c’est un très beau titre (…) Et puis, c’est un très beau roman. Qui devrait ouvrir les yeux de tous ces jeunes qui ont encore une vision romantique de l’engagement armé, de la lutte kalachnikov au poing. (…) Alain Lallemand raconte son histoire avec puissance et humanité. Ce ne sont pas des icônes que le lecteur voit agir, mais des êtres humains, des vrais, avec leurs faiblesses, leurs forces, leurs erreurs, leurs interrogations ou leur aveuglement. Théo et Angela vibrent. (…) L’auteur a le talent de mêler au questionnement philosophique de Théo et Angela le train-train de la vie quotidienne, la lumière et l’ombre de la jungle, la beauté et les cris des oiseaux qui jacassent, si bien que le lecteur vit avec eux, souffre de crampes, angoisse, sourit, s’émerveille, pleure avec eux. » (★★★)

La critique de Guy Duplat, dans La Libre Belgique de Bruxelles: « Son troisième et fort réussi roman (…) Un livre à l’écriture très inspirée qui est un chant d’amour à la Colombie et interpelle sur notre besoin de révolte. »

La critique d’Isabelle Falconnier, de L’Hebdo de Lausanne:  » Alain Lallemand, journaliste au Soir de Bruxelles, déjà remarqué avec son précédent roman, Ma plus belle déclaration de guerre, revient en force avec ce nouveau livre aussi épique que sensuel, d’une écriture haletante et tendue comme la folie des hommes. Lallemand interroge: que sont ces révoltes qui montent, partout, d’un djihad quelque part au retour des marxistes ou des romantiques de la lutte armée, ailleurs, ou ici? L’amour n’est-il pas la plus terrible des batailles à mener, aussi? A quel moment reprendre les armes peut-il se comprendre comme la dernière forme d’humanité possible? Et dans la jungle, Dieu dansait, roman réussi et fort, raconte ainsi dans la forêt tropicale une valse lente entre l’amour et la révolte. Avec cette question décisive que l’on murmure comme en apnée: et si c’était la même chose? » (Dans la sélection Payot-L’Hebdo Printemps 2016, le roman est l’un des deux « coups de cœur de la rédaction ».)

La critique de Frédéric Loore dans Paris-Match: « L’écriture romanesque d’Alain Lallemand ne cède rien à l’exigence du détail journalistique et nous plonge dans un récit enlevé qui fait la part belle à l’aventure, à la description poétique d’une nature grandiose avec laquelle ses personnages entretiennent un rapport tant charnel que spirituel, à l’humanité enfin, comme ultime résistance au fracas du monde. » 

La critique d’Eric Brucher, sur Radio Antipode: « Un roman intelligent parce qu’il force la réflexion, mais également sans pessimisme ; au contraire, il y souffle un vent tonique et stimulant, et qui donne d’ailleurs à l’amour toute sa force révolutionnaire, tout en proposant un grand rendez-vous avec la nature, cette jungle qui permet de retrouver le sens de la vie, de toute vie. »

Revue de presse:
L’Appel, avril 2016
Paris-Match, mars 2016
Le Soir, janvier 2016
Le Vif, janvier 2016


Le livre de Poche, Paris, mars 2020, 288 pp.,
version revue et augmentée par l’auteur.